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Abidjan le 11 février 2022 (Infoplus.ci)-Oumar Diawara, le richissime hommes d'affaire qui a obtenu une décision de la Cedeao contre l'Etat ivoirien, a été pris en flagrant délit de manipulation. Muni de ladite décision, obtenue dans des conditions pour le moins étonnantes, et qui demande à la Côte d'Ivoire de lui verser plus d'un milliard de francs Cfa, M. Diawara se promène de pays en pays aux fins de saisir des biens de l'Etat ivoirien. Après avoir échoué au Mali où, avec la complicité d'un cabinet d'huissier il avait tenté de bloquer un avion, le voilà qui remet le couvert à Dakar en demandant à la Bceao de saisir les comptes de la Côte d’Ivoire. Sacré courage pour Oumar Diawara, condamné pourtant par le tribunal correctionnel d'Abidjan, jeudi 2 décembre 2021, pour ‘’complicité d’abus de biens sociaux et blanchiments de capitaux’’. Il a écopé de 20 ans de prison ferme, 50 milliards de Fcfa d'amende, 25 milliards de Fcfa de dommages et intérêts à l’Etat de Côte d’Ivoire. En sus, la justice ivoirienne a ordonné "la confiscation de ses biens et l'interdiction de séjour sur le territoire ivoirien" . Un mandat d’arrêt a été lancé contre lui.
Oumar Diawara feint d'ignorer, ou peut être l'ignore-t-il, un individu ne peut saisir les biens d'un État, même s'il a une décision favorable de la Cour de Justice de la Cedeao. D'ailleurs, concernant ce sujet, dans un courrier en date du 04 février 2022 dont infoplus.ci a pu se procurer une copie, le Greffier en Chef de la Cour de Justice de la Cedeao a fait parvenir au Garde des Sceaux, ministre ivoirien de la Justice et des Droits de l’homme, Sansan Kambilé, une copie de l’arrêt du 22 octobre 2021. Arrêt dans lequel ladite Cour a condamné l’Etat de Côte d’Ivoire à payer, à Monsieur Oumar Diawara, les sommes de 1 250 000 000 Fcfa et d'un franc symbolique en réparation respectivement de la violation de ses droits et du préjudice moral qui lui a été causé. Il ne s’agit donc pas d’une nouvelle décision rendue à la requête de M. Diawara, comme il tente de le faire croire. Cette notification, poursuit le courrier, qui vise à informer l’Etat concerné du caractère définitif et donc exécutoire de l’arrêt, est faite conformément aux dispositions de l’article 24 du Protocole amendé relatif à la Cour de Justice de la Communauté.
Aux termes de l’article 24 du Protocole amendé, «l’exécution forcée, qui sera soumise par le Greffier du Tribunal de l’Etat membre concerné, est régie par les règles de procédure civile en vigueur dans ledit Etat membre ». Le paragraphe 3 précise que la formule exécutoire est apposée « par l’autorité nationale que le Gouvernement de chacun des Etats membres désignera à cet effet ». Il en résulte que l’apposition de la formule exécutoire ressortit à la compétence, non pas du Greffier de la Cour de Justice, mais de celle du greffier en Chef désigné par le Gouvernement, conformément aux dispositions du Code de procédure civile, commerciale et administrative. En des termes clairs, une décision de la Cour de Justice de la Cedeao ne s'applique qu'en parfaite collaboration avec les États membres. Dans le Protocole relatif à la Cour, une nouvelle disposition (qui devient I'Article 24) est libellé, notamment dans l'une de ses sections comme suit : " L'execution forcée, qui sera soumise par le Greffier du Tribunal de I'Etat membre concerné, est regie par les règles de procedure civile en vigueur dans ledit Etat membre. La formule executoire est apposée, sans autre contrôle que celui de la vérification de I'authenticité du titre, par I'autorité nationale que le Gouvernement de chacun des Etats membres designera à cet effet. Les Etats membres désigneront I'autorité nationale compétente pour recevoir ou exécuter la decision de la Cour et notifieront cette designation a la Cour. L'exécution forcée ne peut être suspendue qu'en vertu d'une decision de la Cour de Justice de la Communauté". À la lumière de cet article, Oumar Diawara est mal fondée à saisir un organe d'un État de la Cedeao pour exécution d'une décision de la Cour de la Cedeao sans accord préalable de cet État. Ses actions ne relèvent que de la communication visant à discréditer la Côte d'Ivoire. Sinon, il peut rien et aucun État de la Cedeao ne prendra le risque d'appliquer une décision qui pourrait brouiller ses relations avec la Côte d'Ivoire, pays stratégique dans la sous-région.
Yves TAPÉ